Suite à la réunion du 21 juillet 2021 du Groupe de travail relatif à l’espèce Callinectes sapidus en région Corse et afin de pouvoir orienter les études et suivis scientifiques sur les lagunes insulaires impactées par la présence du Crabe bleu, une réunion avec Pascal Romans (Responsable du Service Mutualisé d’Aquariologie Conservateur du Biodiversarium à l’Observatoire océanologique de Banyuls-sur-Mer) a été sollicitée afin que ce dernier nous face part des dernières connaissances acquises sur la caractérisation de traits de vie du Crabe bleu en mésosomes. En effet, sur la base de crabes prélevés dans les lagunes d’Occitanie (95% provenant de la lagune de Canet particulièrement envahie en 2021), ce chercheur a réalisé des tests pour mieux caractériser le régime alimentaire du Crabe en milieu naturel. Des variations de paramètres environnementaux (e.g. température, salinité) ont également été reproduites en aquarium afin de pouvoir interpréter certains comportements et affiner notre compréhension sur sa croissance et son développement dans nos lagunes méditerranéennes.
Pascal Romans le 05/10/21 dans le cadre de la réunion du groupe de travail scientifique en région Corse.
Les résultats de ses tests et sa connaissance de l’espèce sont assez alarmants :
- il semblerait qu’il y ait 2 périodes de reproduction annuelles (avril/mai et septembre). Une femelle peut pondre jusque 7 millions d’œufs (nombre d’œufs dépendant de la taille de l’individu), la maturation des œufs est très rapide (15 jours) et les larves semblent résistantes
- la croissance de l’espèce est très rapide (2 cm à 13,5 cm en 3 mois),
- il a un régime alimentaire très varié. Le crabe bleu est omnivore (e.g. anguilles, poissons, moules, huîtres ; des analyses complémentaires sur le contenu stomacal permettront d’affiner ces recherches). Des observations de prédation sur les canetons ont été observées sur le Delta de l’Ebre ;
- il est eurytherme (de 3°C à au moins 37°C) et euryhalin (mortalité observée en eau douce (0 g/l), mais résistant de 3 à 60 g/l), très forte résistance. De plus, l’absence ou la faible présence de poulpe (son principal prédateur au stade adulte) dans les milieux lagunaires et la surpêche de ce dernier ne permettent pas de lutter contre sa prolifération et son expansion géographique.
L’étang de Canet (Pyrénées-Orientales) a subi une invasion spectaculaire en 2021, alors que quelques individus avaient été observés en 2017. En 2021, 2 000 individus ont été pêchés par jour, totalisant 60 000 individus, soit environ 5 tonnes.
Dans nos lagunes méditerranéennes françaises, quelques critères semblent favoriser son développement : l’état écologique dégradé du milieu, la faible profondeur, les variations importantes de salinité de ces lagunes sédimentaires, l’absence de prédateurs au stade larvaire (dorades, bars) ou adulte (poulpe).